On dit souvent qu’on veut le meilleur pour ses enfants.
On nous demande aussi, en général pour nous forcer à nous conformer à une injonction, si on veut vraiment le meilleur pour nos enfants.
Eh bien moi, non.
Cette idée me trotte dans la tête depuis longtemps déjà. Elle en a fait le tour, est passée par une conversation avec Lena et puis ce soir, en lisant le dernier article de Marchande de sable, j’ai décidé de me lancer.
Déjà, je ne pense pas que ce soit possible de donner le meilleur en tous points à son enfant. Non seulement parce que c’est un coup à crever d’épuisement, mais aussi parce que le meilleur, c’est contradictoire. Il y a la meilleure nourriture, les meilleurs vêtements, le meilleur couchage, la meilleure communication, le meilleur enseignement, les meilleurs loisirs… Et ils ne sont pas compatibles entre eux.
Ne me lancez même pas sur le fait que « le meilleur » c’est très subjectif, parce qu’on en aurait pour la nuit.
Le fond de l’affaire, c’est que vouloir constamment le meilleur pour son enfant pousse à faire de constants sacrifices. Vous noterez que ça n’a rien de choquant en soi, perso on m’a toujours vendu qu’être mère c’était se sacrifier chaque jour que dieu fait.
Sauf que moi, je n’y crois pas.
Pourtant des sacrifices, j’en ai fait, j’en fais et j’en ferai encore que je ne pense pas du tout regretter.
Les premiers mois du Jaguarondi ont été pavés de sacrifices en raison du RGO dont elle souffrait. Des sacrifices pour elle, pour son bien-être, sa survie, pour des besoins vraiment essentiels. C’était épuisant mais je n’ai aucun regret, je considère que la soigner et la consoler de notre mieux faisaient partie de nos missions premières.
Mais aujourd’hui j’ai deux enfants en bonne santé et je ne veux pas le meilleur pour eux.
En effet, je souscris à la théorie qui veut que les rapports que l’on entretient avec ses enfants vont plus ou moins donner le ton pour leurs rapports avec… ben, tout le monde en fait. Que les relations avec les autres s’apprennent premièrement en famille et que si on veut changer de façon de voir les choses, ça demande énormément de boulot – ainsi que, potentiellement, une thérapie.
Je ne veux pas faire croire à mes enfants que quelqu’un qui les aime, c’est quelqu’un qui va tout sacrifier pour eux, pour leur donner constamment le meilleur, au détriment de ses propres intérêts.
Je veux leur montrer ce que c’est d’avoir une relation équilibrée à l’autre. L’équi-dignité, comme dit David Dutarte.
En espérant qu’ils traitent leur amis, conjoints, collègues et peut-être un jour leurs enfants, avec respect, mais aussi qu’ils s’estiment dignes de respect. En gros j’aimerais bien que mes enfants ne soient pas des connards toxiques qui estiment qu’ils le valent bien, ni des gens qui s’entourent de connards toxiques parce qu’ils croient qu’ils ne valent pas mieux.
Donc non, je ne veux pas le meilleur pour mes enfants, je veux le meilleur pour nous tous, ce qui signifie que parfois, c’est aussi mon tour et qu’ils auront les restes.
Ainsi, le Jag n’a pas fait d’activité extrascolaire cet hiver parce que tout ce qu’il y avait, c’était poney dans le froid et ça me gonfle. Mes enfants ne mangent pas des plats mitonnés à base de paniers bio de l’AMAP chaque soir parce que j’ai autre chose à faire de ce qui me reste de jeunesse et que de toute façon ils mangent que dalle au dîner. Je n’hésite pas à les faire garder par leur nounou, baby-sitter ou grand-mère pour avoir du temps pour ma carrière, pour rénover la maison ou juste faire un truc pour moi. Je préfère les coller devant la télé au risque de provoquer la fonte immédiate de tous les neurones durement acquis en jouant aux kaplas, si ça peut me permettre de passer tranquillement l’aspirateur dans les chambres.
Tant pis s’ils n’ont pas toujours « le meilleur ». S’ils ont des parents aimants et pas trop mal dans leur peau, ce sera déjà pas mal. Et puis c’est quand même sympa s’il leur reste encore des choses à désirer, non ?

Ça me fait penser à cette discussion que j’avais eu avec ma sage femme, les premiers mois de Pokémon, ou j’étais épuisée de pas dormir la nuit et que je lui disais que je ne savais plus si je voulais vraiment continuer l’allaitement et le cododo mais que je voulais le meilleur pour ma fille, elle m’avait dit « tu es prête à te sacrifier pour elle ? » J’avais répondu oui et alors elle m’a dit une phrase dont j’ai fait mon mantra depuis c’est « est ce que tu veux qu’un jour elle se sacrifie pour quelqu’un ? Parce qu’en te sacrifiant pour elle, c’est l’exemple que tu lui donnes. L’amour ce n’est pas des sacrifices, c’est des compromis pour que les deux vivent cette relation avec sérénité et bonheur »
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